Pensées d'amour d'un psychologue : « Je souhaite écrire sur l’amour »
Puisse cet écrit, résonner, auprès de ceux qui aiment malgré eux, pourtant engagés dans une relation familiale, et éclairer des âmes égarées.
© Pensées lues et écrites par C. Crouzat - Photo L'Amour et Psyché à demi couchée - visible au Louvre de Paris - salle 403 - Canova, Antonio (1757 - 1822) - Italie
Je souhaite écrire sur l’amour, et pourtant je n’y connais rien.
Comme toi, je suis un disciple qui apprend et expérimente.
Si j’écris, c’est que la vie m’a offert le luxe de pouvoir penser.
Peut-on penser le cœur ? Et peut-on le panser également ?
L’amour a frappé à ma porte, à un moment où je ne l’attendais pas.
Il me terrorise, me glace, me dépouille de tout ce que j’avais alors.
Ou plutôt, me réveillerait-il d’un déni ? Pire d’une abnégation ?
A la fois, je crains de me rendormir et d’oublier, et parfois je le souhaite, ne voyant d’autres issues que celle de la souffrance et d’une déchirure.
Est-ce cela le dilemme de l’homme moral ?
Contraint de choisir entre porter ou projeter la faille qui vient de s’ouvrir en soi ?
J’admire mon amante pour son sens du sacrifice et du devoir.
Et en même temps, je ne peux me résoudre à une vie faite uniquement de sacrifices.
Qu’est-ce donc que vivre ?
Ne dit-on pas « aime-toi toi-même, comme tu aimes ton prochain ? »
Mais alors que serait-ce s’aimer soi quand on aime un autre ?
Qu’est-ce donc qu’aimer ?
Quand on aime de cet amour, on n’en dort plus, on tombe malade. La vie devient lourde et souffrante.
Ce qui nous manque, c’est l’être aimé.
Ce qui nous effraie, c’est sa perte, alors que nous mesurons sa valeur pour nous.
Aimer pour moi, ce serait alors rejoindre l’autre, faire corps et cœur. Retrouver cette fusion des premiers instants, et prier et pleurer qu’ils durent à jamais.
Pourtant, mon ami, je ne suis pas seul, et là est le drame de cette histoire.
J’aime ma femme et mes enfants.
Je rêve pour eux, d’une longue vie, heureuse et sécurisante.
Car mon ami, vois-tu, je me reconnais dans ce rôle de papa. Et je souhaite, à mes enfants, de voir leurs parents heureux et solidaires.
Les enfants n’entendent que ce qu’ils voient et non ce qu’on leur dit, parait-il.
Que verront-ils donc ? Puis-je les duper ? Puis-je masquer cela en moi ?
Rester et vivre comme si de rien était. Vivre une vie confortable, et sécurisante, où le quotidien m’offre la perspective d’une vie tranquille.
Mais alors, j’accepterai de me couper de moi. M’aimerai-je ?
Pourrai-je me regarder dans ce miroir, et tenir en pensant à cet amour-là ?
Puis-je être là, debout, face à ma femme et mes enfants, comme si de rien était ?
Car l’amour a frappé, et moi, je n’ai rien demandé.
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Note au lecteur :
Cet écrit, je le dédicace à tous ceux qui sont frappés par l’amour, et qui font l'expérience de l'impasse. Une impasse qui n'a d'autres issues que la souffrance.
A tous ceux qui :
ne le comprennent pas,
ne se sentent pas compris par l’entourage,
sont jugés trop rapidement (par un conjoint, de la famille, des amis…),
se sentent seuls, et ne peuvent, ni ne savent trouver un écho rassurant et éclairant.
Aimer de cet amour, c’est être en proie à une énergie extrêmement puissante. Tellement puissante que le corps physique et psychique sont mis à très rude épreuve.
Le sujet peut tomber malade, en dépression, perdre l’appétit, tomber dans des addictions, perdre le goût de vivre.
Il est alors vital et urgent de pouvoir trouver un écho rassurant et une matrice sécurisante, car l'expression de cet amour, est probablement ce que l'enfant au fond de nous a besoin.
Nous ne sommes pas responsables de tomber amoureux ! Ni ne devons l’être !
L’amour ne se commande pas, ni se réfrène. Il se vit.
La question qui se pose alors est « comment le vivre ? ». Toute la question de l’articulation de l’énergie d’amour avec les valeurs morales, et les conséquences sur le quotidien sont à étudier, et peuvent faire l’objet d’un travail thérapeutique.
Rester dans une UNION, peut apparaître comme clé au travail spirituel et thérapeutique. Réaliser la conjonction des opposés. C’est aussi cela aimer.
Le cheminement spirituel pourrait être de commencer par intégrer cette idée de l’Amour comme une invitation divine, et prendre le temps de rester avec Soi, en étant bien accompagné. Car si l’Amour est réel, réciproque ou pas, il est aussi, une projection d’archétypes puissants du Soi à l’extérieur (animus/anima).
Si l’art qui me traverse, me pousse à verbaliser ce que l’on peut vivre en amour ainsi, c’est que je ne vois comment ce mystère qu’est l’amour pourrait être évoqué, et décrit autrement.
Une amie m’apprend que les mots ont un sens et une musicalité. Elle me l’enseigne de la plus belle des manières, et je l’en remercie de tout cœur.
En thérapie, l’amour est un sujet qui revient souvent, et qui nous touche tous.
Tantôt parce que l’arrivée d’un enfant nous frappe, et fait éclater ce qu’on a connu jusqu’alors dans le couple.
Tantôt parce que je ne me sens plus exister en tant qu’amant ou amante dans mon foyer.
Tantôt parce j’ai fait une rencontre qui me projette dans un univers que je ne connais pas, ni ne maîtrise, et qui fait naître en moi une multitude de sentiments et sensations, où je me sens vivant et vulnérable. Parce que parfois, il est de ces rencontres qui nous font nous sentir vivant.
Et si aimer en tant qu'amants c’était ça ? Et si aimer c’était vivre et se sentir vivant ?
Quel couple déjà constitué ne voit, la flamme de l’amour s’endormir, à ne plus pouvoir, ou vouloir briller ? A devenir un couple qui s'aime, d'un amour fraternel et amicale ; mais plus d'amants.
A titre personnel, l’art et la musique m’aident à danser avec ses passions* en moi.
* Pour reprendre la symbolique de la passion chez les platoniciens, celle-ci était associée à la souffrance, et au diable, de "pathos" pour souffrance. Il valait mieux aimer d’un amour plat et sans passions, pour ne pas souffrir.
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